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Mémo de mes mots des maux.

Je vide mon sac.

5 heures 47

Publié le 21 Avril 2020 par AG

Je crois que c'est ce jour là, au milieu d'une pandémie planétaire, au milieu d'angoisses et de larmes salées, de matraques ensanglantées, au milieu de tout ce que l'humain pouvait nous offrir de pire, de mes souvenirs qui me hante comme des cicatrices mal vieillies, de cet amour naissant et cette innocence, cette pureté d'un jeune éperdument épris de ma violence, c'est au milieu de tout cela que j'ai compris une leçon, aussi infime soit-elle.

J'ai pris cette habitude le soir dans mon lit de m'asseoir et d'écouter de la musique; certains soirs je ferme les yeux et je suis en train de danser avec des amis, d'autres soirs je suis dans ces bras, parfois je joue à un jeu de société et je suis concentrée, ou hilare, je suis en train de boire une bière au bord de l'eau, parfois même je suis simplement assise dans mon lit. C'est cette immense solitude. Comment une solitude peut-elle être si grande ? J'ai l'image de mon corps à genoux, et une caméra qui ne cesse de reculer vers l'immensité jusqu'à qu'on ne distingue plus qu'un tout petit point. Nous sommes ce misérable point, et tout  se décime progressivement, les arbres tombent, les corps frottent les graviers, on découvre avec stupeur que rien ne nous a été offert gracieusement. Non, nous avons tout pris, et même dans la plus grande délicatesse cela n'en restera jamais moins qu'un pillage. Et c'est face à cet extrême solitude, que certains font reculer la caméra jusqu'à n'être plus rien, jusqu'à pouvoir observer l'essentiel, ces multitudes de petits pixels sur l'écran de l'humanité. Mais à quoi bon, si d'autres dans leur retrouvaille avec soi ne peuvent plus se dégager de ce qu'ils sont et ils appuient si fort sur leurs pustules haineuses qu'ils arrivent à en faire sortir ce qu'il y a de plus désagréable a affronter dans ce monde. Ils pressent avec force mais sans volonté aucune sur ces plaies encore ouvertes, le pu en sort et la douleur gronde dans les ventres affamés de ceux qui subissent. Et ceux qui subissent, sans pouvoir distinguer qui fait ce mal, qui est à l'origine de la plus grande implosion de haine, de violence, finiront par reprocher aux petits points plongés dans leurs extrêmes solitudes ce qu'ils doivent affronter.

Et c'est à genoux, que je comprend que tout s'effondre autour de moi lorsque je m'oublie, lorsque je fais le choix que tout s'écroule et parte en fumée. Je comprend qu'inévitablement, la Terre ne perd pas ses cheveux mais elle perd ses poux, et j'ai choisis d'en extraire ce qu'il y avait de plus laid, de plus beau. J'ai choisis de rendre la laideur belle.

C'est en me grattant le crâne jusqu'au sang, en me lacérant la peau avec toutes ces lames jusqu'à que le sang inonde mes draps encore trop noir que le monde s'est décimé. 

Étrangement, cette solitude imposée par autrui me fait moins souffrir que la solitude que je m'étais imposée durant toutes ces années. Étrangement, je sens au fond de mon cœur un vide, mais inhabituellement ce vide ne cherche pas à être rempli, il cherche a exister en tant que tel, en tant qu'horizon, en tant que grandes profondeurs. Je suis face à ce précipice et je ne veux pas sauter, le vide est beau, le vide n'est plus un manque, il est une liberté. 

 

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